LES DÉBUTS DE L’IMMIGRATION JUIVE EN TERRE PROMISE
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Communauté juive dans un Shtetl d'Europe de l'Est
(début XXè siècle)
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Les juifs ashkénazes, majoritairement issus du monde européen, ont été les premiers pionniers du sionisme, l’idéologie du retour sur la Terre d’Israël des communautés juives dispersées à travers le monde et de la création d’un foyer national juif. Ils ont jeté les bases du développement politique, économique et culturel du futur État d’Israël.
Dès les années 1880, les juifs de l’Empire Russe, puis d’Union Soviétique et de Pologne, fuyant les pogroms et les violences antisémites, émigrent en Palestine. Ils ont été suivis à partir du début des années 1930 par les juifs d’Allemagne, d’Europe Centrale et Orientale (Autriche-Hongrie, Tchécoslovaquie, Roumanie, Salonique…), victimes des persécutions nazies, puis après la Seconde Guerre Mondiale par les survivants de la Shoah.
Juifs russes
(Empire Russe, URSS)
5,2 millions de juifs vivaient dans l’Empire Russe en 1897. Les pogroms ont déclenché le départ de 3 millions de juifs, principalement en Occident (États-Unis, Angleterre, France) et en Palestine pour ceux ralliés à la cause sioniste.
1,1 million de juifs ont été exterminés pendant la Seconde Guerre Mondiale.
1,2 million de juifs d'origine russe vivent aujourd'hui en Israël,
représentant la première communauté juive, conséquence de l’immigration massive des années 1990, suite à l’effondrement de l’Union Soviétique !
Il ne resterait plus que 100 000 juifs dans la Fédération de Russie.
- Pourquoi et quand ont-ils émigré en Israël ?
Les 2 premières vagues d’immigration ont eu lieu sous
l’Empire Ottoman, avant que la Palestine passe sous
mandat britannique
en 1920.
À partir de 1882, le Baron Edmond De Rothschild,
sioniste et philanthrope, a joué un rôle capital dans la réinstallation des juifs en Palestine et le développement de nouvelles colonies agricoles, en investissant des sommes colossales dans l’achat de terres aux arabes en Palestine.
La première Alya* (1882-1903)
a amené environ 30 000 russes fuyant les pogroms et persécutions antisémites de la Russie tsariste.
La deuxième Alya (1903-1914)
était composée de 40 000 russes, majoritairement militants socialistes, de jeunes olims qui furent très actifs dans la création des Kibboutzim et la construction de Tel-Aviv.
La troisième Alya (1915-1923)
rassemblait 35 000 juifs russes, polonais et des pays baltes, fuyant les massacres antisémites, perpétrés par les troupes ukrainiennes et les armées blanches, ayant causé la mort de 100 000 juifs, au cours de la guerre civile qui a suivi la révolution bolchévique de 1917. Elle fut encouragée par la conquête britannique de la Palestine et la Déclaration Balfour.
La quatrième Alya (1924-1928)
est venue principalement de Pologne avec l’arrivée de 80 000 migrants, en raison de la crise économique, de la politique anti-juive et de l’introduction par les États-Unis de sévères quotas d’immigration.
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Alya ("montée" en hébreu) : acte d'immigration en Terre d'Israël.
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Ces jeunes pionniers russes ont fondé le premier kibboutz, Degania Alef en 1910.
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- Personnalités célèbres originaires de l’Empire Russe
Russie, Ukraine, Biélorussie, Pologne… ont été les viviers des grands leaders politiques et de l'élite intellectuelle d’Israël.
- Politiques
: Golda Meir, David Ben Gourion, Jabotinsky, Menachem Begin, Shimon Peres, Chaïm Weizmann
- Architectes
emblématiques de Tel-Aviv : Joseph Berlin, Yehuda Magidovitch, Moshe Czerner
- Nés en Israël (parents issus des alyas russes)
: Moshe Dayan (né à Degania, le 1er
kibboutz), Yitzhak Rabin, Ariel Sharon;
les écrivains, Amos Oz, David Grossman , le cinéaste, Amos Gitai.
Juifs européens
Avec la victoire du nazisme en Allemagne en 1933 et l’intensification des persécutions, discriminations et spoliations, l’immigration juive en Palestine mandataire augmenta drastiquement. Entre 1932 et 1939, la Palestine absorba 250 000 nouveaux arrivants, d’Allemagne et d’Europe centrale (Pologne, Autriche-Hongrie, Tchécoslovaquie).
- Pourquoi et quand ont-ils émigré en Israël ?
- L'IMMIGRATION PENDANT LA PÉRIODE NAZIE
La
cinquième Alya (1929-1939)
fut davantage celle de l’exode des juifs pour sauver leur vie que celle d’un choix sioniste.
Pour ces Juifs ashkénazes, la plupart issus d’une bourgeoisie intellectuelle, l’arrivée en Palestine fut un bouleversement inouï : déracinés d'Europe en Orient, souvent déclassés socialement, ils durent redémarrer à zéro dans un pays où tout était à construire, travailler durement dans l’agriculture, vivre en communauté… Un changement de paradigme radical !
Il faut savoir que l’émigration en Palestine fut facilitée avant la guerre par
les accords Haavara
(« transfert » en hébreu),
négociés en 1933
entre le gouvernement allemand et l’Agence juive pour la Palestine,
moyennant de fortes contreparties économiques. Au départ, Hitler voulait une Allemagne sans juifs, donc l’émigration restait possible. Ces accords ont permis le départ de 60 000 juifs allemands en Palestine jusqu’en 1939.
Progressivement, dans un contexte où la persécution des juifs en Europe ne faisait qu’augmenter,
la politique des quotas des pays européens et des États-Unis
ne fit qu’aggraver le sort des réfugiés juifs.
En 1941, avec l’instauration de
« la solution finale », consistant en l’extermination de masse des juifs d’Europe, les départs furent totalement interdits.
En 1939, la Grande-Bretagne publia un
Livre Blanc limitant l’immigration juive en Palestine
à 75 000 personnes sur 5 ans et l’achat de terres par les juifs, l’objectif étant d’éviter le soulèvement de la population arabe.
L’immigration illégale (Alya Beth) permit de contourner ces restrictions.
Grâce aux organisations sionistes, des navires affrétés par la Haganah (l’organisation de défense armée des juifs de Palestine), parviendront à rejoindre clandestinement la Palestine. Mais, un grand nombre d’entre eux seront renvoyés vers leurs ports de départ.
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Liquidation du Ghetto de Varsovie, avril 1943 - Gustav Metzger
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Arieh Sharon - Tel-Aviv 1936
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Liebling Haus - icône du Style International
Tel-Aviv 1936
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- L'IMMIGRATION DES SURVIVANTS DE LA SHOAH
La fin de la Seconde Guerre Mondiale a provoqué
une crise humanitaire des réfugiés sans précédent.
Les juifs ayant survécu aux camps de la mort ne voulaient pas retourner en Europe Centrale et Orientale, en raison de l’antisémitisme toujours virulent et parce que leurs communautés y avaient détruites :
- 3 millions de juifs ont été exterminés en Pologne (90% de la communauté juive) - 1,1 million de juifs d’URSS (35%)
- 570 000 juifs hongrois (70%) - 290 000 juifs de Roumanie (47%) - 220 000 juifs des Pays Baltes (80%) - 142 000 juifs d’Allemagne (25%)
- 100 000 juifs des Pays Bas (71%) - 80 000 juifs de Bohème Moravie (66%) - 71 000 juifs de Slovaquie (80%) - 77 000 juifs de France (22%) - 67 000 juifs de Grèce (87%) - 63 000 juifs de Yougoslavie (81%) - 50 000 juifs d’Autriche (27%)...
Source : "The Encyclopedia of the Holocaust"
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Jeunes rescapés du Camp de Buchenwald
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L'espoir de la Terre promise...
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Un grand nombre de juifs voulaient reconstruire leur vie en "Eretz Israel", qu’ils considéraient comme leur « foyer naturel », », un pays d’espérance avec ses idéaux d’égalité et de fraternité, où le juif serait un "homme nouveau".
Les Britanniques poursuivirent des restrictions sévères d'entrée en Palestine, en raison des objections arabes, incitant encore à l’immigration clandestine. Ils furent responsables de situations tragiques.
Il fallait organiser
l'exode des réfugiés juifs vers la côte pour tenter d'embarquer pour la Palestine, à travers les frontières fermées de l'Europe.
Ces opérations étaient orchestrées par
le Mossad Aliyah Bet
(Organisation pour l'Immigration "illégale",
créée par les dirigeants juifs de Palestine), avec le concours du
réseau clandestin « Brihah »
("évasion" en hébreu). Les survivants de la Shoah partaient des camps de personnes déplacées (en Allemagne, Autriche et Italie) ou d'autres lieux en Europe orientale, pour se retrouver dans des points de rassemblement dans des villes portuaires (Italie, France, Yougoslavie, Grèce). Les bateaux étaient de vieux cargos, en très mauvais état, surchargés de passagers. La majorité des bateaux étaient interceptés par la marine britannique et les réfugiés placés de force, par les autorités britanniques, dans des
camps de détention, principalement à Chypre.
En 1948, 50 000 réfugiés juifs y étaient détenus.
- Le cas de l’EXODUS 1947
provoqua une indignation totale de l’opinion publique internationale : 4554 survivants de la Shoah, embarquèrent clandestinement de Sète (sur un bateau conçu pour 700 personnes maximum), pour rejoindre la Terre promise, munis de faux papiers et de visas colombiens. Les anglais empêchèrent le débarquement des passagers en Palestine. À l'issue de plusieurs semaines de conflits dramatiques, dans des conditions sanitaires épouvantables, ils les renvoyèrent dans des camps de détention en Allemagne. Un symbole catastrophique pour l’image de "libérateurs" des anglais dans le contexte post-holocauste !
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Yad Vashem (« un monument et un nom ») : le Musée d’histoire de la Shoah en mémoire aux victimes juives (Jérusalem)
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Cette crise des réfugiés conjuguée à la multiplication d’attentats terroristes, par les organisations sionistes (Haganah, Irgoun, Palmach) contre les britanniques, viendront à bout du Mandat britannique sur la Palestine et aboutiront à la création de l’État d’Israël.
Le 29 novembre 1947, l'Assemblée générale des Nations Unies vota la partition en deux nouveaux États, l'un juif et l'autre arabe, acceptée par les dirigeants juifs, mais rejetée par les Arabes.
Le 10 mai 1948, David Ben Gourion, le président de l'Organisation juive pour la Palestine, proclama la création de l'État d'Israël.
Dès lors, les limitations à l'immigration juive furent levées, provoquant un afflux considérable de migrants et de personnes déplacées.
Toutefois, le réseau « Brihah » avait réussi l’exploit d’exfiltrer illégalement
près de 250 000 Juifs d’Europe centrale et orientale entre 1945 et 1948
(Roumanie, Pologne, puis de Bulgarie, Hongrie, République Tchèque, Allemagne).
Une forme de continuité a existé entre ce mouvement et les manœuvres mises en place par la suite par l’État d’Israël et ses services spéciaux pour exfiltrer des Juifs par-delà le Rideau de fer des années 1950 aux années 1970.
Une question majeure anime et divise les historiens : La Shoah est-elle à l’origine de la création de l’État d’Israël ?
La réponse la plus souvent répandue est que la tragédie du génocide juif européen a joué
un rôle de catalyseur.
Néanmoins, de toute évidence, sans l’existence en 1945 d’une communauté juive forte d’environ 500 000 âmes (le Yishouv) et d’une base pré-étatique juive en Palestine, l’État d’Israël n’aurait pas pu voir le jour. L’État juif est d’abord, le produit d’un demi-siècle d’efforts constructifs déployés par le mouvement sioniste, de propagande dans les communautés, d’encouragement à l’alya, d’achats de terres et de création d’implantations industrielles, d’institutions sociales et politiques juives et d'une armée de défense.
- À voir ou à revoir
:
EXODUS
de Otto Preminger. L’épopée tragique des survivants de l’holocauste, en route vers la Palestine.
- À lire :
Les déracinés
de Catherine Bardon, une formidable histoire d’exils et de destins hors du commun (saga en 4 tomes)
- Là où nous sommes chez nous -
L'histoire de ma famille éparpillée
de Maxim Leo
Découvrez d'autres aventures humaines aux carrefours de l'Histoire...
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Incontournable, à Tel-Aviv :
ANUMUSEUM, le plus grand musée au monde sur l'histoire du peuple juif.
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